L'analyse du sujet - Exemple

I. Il n’y a de problématisation valable qu’à partir de l’analyse de l’énoncé

 

Il s’agit d’abord de préciser que cette problématique doit dériver de l’analyse du sujet. Il n’y a pas de problématisation valable si elle ne dérive pas de l’analyse du sujet, pour deux raisons. Il y a deux écueils principaux quand on analyse un sujet au départ :

– On cherche tout de suite à développer, à trouver des parties, à se référer au cours. 

– On développe une problématique, ce qui est bien, mais cette problématique est hors-sujet, c’est-à-dire qu’elle ne dérive pas de l’analyse de l’énoncé.

 

II. Apprendre à lire l’énoncé

 

Il faut apprendre à lire un énoncé de telle sorte que la problématique puisse dériver de cette analyse. Apprendre à lire un énoncé, c’est en particulier être attentif, non pas tout de suite, au sens qu’a cet énoncé mais à la lettre de l’énoncé, c’est-à-dire à la manière dont il est formulé.

Par exemple, dans le sujet « Peut-on vraiment connaître autrui ? », le mot « vraiment » est très important. On ne demande pas simplement de savoir si on peut connaître autrui mais il est question de savoir si on peut le connaître vraiment. Ensuite, le mot « autrui » est fondamental. C’est dans l’attention à la manière avec laquelle les mots sont choisis que pourra se dégager un problème. 

Finalement, il est question de définir les termes du sujet. C’est essentiel pour faire dériver la problématique de l’analyse de l’énoncé. Il ne s’agit pas de donner une définition qui serait académique, définitive, et qu’on aurait toute prête. Au contraire, il faut montrer qu’un mot peut avoir plusieurs significations et que c’est cette diversité des acceptions des mots qui fait qu’un problème peut se présenter.

 

III. Définir les termes du sujet

 

Définir les termes du sujet, cela veut dire en particulier essayer de penser le rapport entre les termes, et ne pas les définir seuls. Si on prend le mot « autrui », par exemple. Pourquoi le sujet utilise « autrui » ? Pourquoi pas une autre formulation, comme « peut-on vraiment connaître un homme ? », « peut-on vraiment connaître un individu ? » ? Autrui, c’est l’autre. Mais le sujet n’est pas « peut-on vraiment connaître l’autre ? ».

Autrui, on va dire que c’est un homme avec un grand H, c’est un individu, donc il est question de savoir si on peut le connaître vraiment. L’inverse de l’autre, c’est le même, le même que moi. On peut ainsi enchaîner un certain nombre de mots pour essayer d’envisager ce que peut vouloir signifier « autrui ».

Mais, le sujet a mis « autrui » et non pas « l’autre ». Donc on pourrait se dire finalement qu’« autrui » n’est pas « l’autre » en tant qu’il est le même que moi, ce n’est pas l’autre ici en tant qu’il est un autre homme, simplement un autre homme qui serait le même que moi. Mais c’est l’autre ou la partie de l’autre qui est autre que moi. Par conséquent, on pourrait faire dériver de cela cette idée qu’autrui est l’autre en tant qu’il m’est étranger, en tant qu’il est différent, en tant qu’il est, en un sens, inconnu.

On a touché ici une idée très intéressante, on a réussi à définir et à intégrer dans la définition du mot « autrui » cette idée que « autrui » c’était celui que, par définition, on ne connaît pas. Il y a là une véritable difficulté qui se présente, quelque chose de contradictoire. On touche là un point essentiel grâce à l’analyse de l’énoncé, de telle sorte que la problématique qu’on construit ensuite dérive bien de l’analyse de l’énoncé. C’est important parce qu’on est dans le sujet véritablement. On n’a pas pensé les termes indépendamment les uns des autres. On a cherché à les définir dans leur rapport réciproque. Qu’est-ce qu’il y a de l’ordre de la connaissance dans le problème du rapport à l’autre ?

Quant à « vraiment », on peut faire une distinction entre une connaissance qui serait une connaissance immédiate ou normale, puisque l’on se connaît les uns les autres, on se rencontre. Il n’est pas tant question de savoir si on peut connaître l’autre, puisqu’évidemment on passe sa vie avec d’autres personnes, mais de savoir si on peut connaître vraiment autrui. De telle sorte qu’il faudrait, en tout cas au brouillon, se demander si on ne pourrait pas définir un critère permettant de distinguer une connaissance normale, évidente, première de l’autre d’une connaissance qui soit une connaissance vraie. S’il y a une connaissance vraie, c’est évidemment parce qu’il y a une connaissance qui ne serait pas une vraie connaissance, une connaissance ou bien fallacieuse, superficielle, ou bien véritablement erronée, fausse d’autrui.

L'analyse d'un sujet plus complexe - Exemple

On applique la méthode vue précédemment à un sujet en particulier, un petit peu plus complexe : « Peut-on reprocher à une œuvre d’art de ne rien vouloir dire ? »

 

I. Intérêt du sujet

 

C’est un sujet intéressant parce que c’est une des difficultés qui se présente souvent. Une des erreurs la plus souvent présente est de prendre l’expression « ne rien vouloir dire » en un seul bloc. « Ne rien vouloir dire », ça voudrait dire finalement n’avoir aucun sens. Une œuvre d’art serait n’importe quoi. L’intérêt de cet énoncé est précisément d’être formulé en trois termes : « rien », « vouloir » et « dire ».

 

II. Définition

 

L’enjeu du sujet est d’essayer de définir ce qu’est une œuvre d’art, de telle sorte qu’il faudra de toute façon à l’introduction éviter de donner une définition qui soit définitive de l’œuvre d’art.

Si on commence par dire, par exemple, qu’une œuvre d’art doit transmettre un message, la question est résolue. Une œuvre d’art qui ne dirait rien, qui n’aurait aucun message à transmettre ne serait pas une œuvre d’art. Or, c’est précisément la question, donc il faut laisser les difficultés ouvertes. Il faut réussir à envisager le fait qu’on nous demande de définir ce que c’est qu’une œuvre d’art.

Or, une des caractéristiques fondamentales de l’art est qu’il ne se présente pas, pour la majeure partie des arts, puisqu’il y en a plusieurs, sous la forme d’un énoncé. Une œuvre d’art n’est pas un énoncé scientifique. Ce n’est pas un énoncé tel que « ceci est comme cela ». Si l’artiste avait voulu dire quelque chose, il l’aurait dit, il l’aurait simplement formulé. S’il ne l’a pas dit par le langage, c’est donc qu’il a eu besoin d’un autre moyen d’exprimer ce qu’il avait à exprimer.

 

III. Problématisation

 

Mais on est en droit, et c’est l’objectif du travail, d’essayer de définir « rien vouloir dire » dans son rapport à « œuvre d’art ». Un des objectifs est de se demander si l’art ne se définit pas précisément par le fait qu’il ne doit pas et n’est pas une démarche consistant à dire quelque chose et qu’il n’est pas question de donner un sens, ou précisément un message.

La principale erreur sur ce sujet a précisément consisté à dire qu’une œuvre d’art doit transmettre, doit exprimer un message alors que c’est tout l’intérêt de ce sujet que d’essayer d’envisager qu’une œuvre d’art peut n’avoir aucune signification. Envisager l’art dans son caractère irrationnel, ou sans signification. De telle sorte qu’il n’est pas question qu’elle s’adresse à notre entendement, notre raison, notre esprit, mais que par exemple elle s’adresse à notre sensation, qu’elle s’adresse à notre corps, qu’elle s’adresse à nos émotions, c’est-à-dire quelque chose qui n’a pas de signification ou qui ne peut pas se résumer à un dire, à une formulation, à un énoncé.

Voilà l’intérêt de l’analyse du sujet que de se demander la raison pour laquelle on a mis « rien vouloir dire ». « Dire » renvoie à la parole : une œuvre d’art peut nous parler, mais elle ne parle pas. De la même manière, une œuvre d’art peut nous émouvoir mais elle ne veut rien. Autant de difficultés qui engagent à trouver des réponses, à se rapprocher d’une problématisation véritable. L’écueil, encore une fois, consisterait à prendre en bloc les expressions. Se demander si une œuvre d’art doit avoir une signification ou pas revient à s’empêcher de montrer qu’un problème véritable se pose. 

L'analyse des sujets en "Peut-on" - Exemple

Une difficulté propre à la dissertation mais que l’on retrouve dans beaucoup de sujets est le début de l’énoncé « peut-on ». C’est un grand classique des énoncés de dissertation, donc que signifie « peut-on » et comment fait-on pour l’analyser classiquement ? Quelles sont les erreurs qui lui sont associées ?

 

I. Définitions

 

« Peut-on » veut toujours dire au moins deux choses. Premièrement, « peut-on » équivaut à « a-t-on la possibilité de », « a-t-on la capacité réelle de ». Deuxièmement, « peut-on » renvoie à la question de savoir « a-t-on le droit » ou « a-t-on la légitimité ».

Si on l’applique au sujet « Peut-on reprocher à une œuvre d’art de ne rien vouloir dire ? », une des erreurs consiste à n’envisager le « peut-on » que du point de vue de la possibilité de telle sorte que le sujet est traité souvent en se demandant s’il y a des œuvres d’art qui n’ont pas de signification.

 

II. Problématisation

 

On a pris des blocs, alors qu’un des enjeux précisément de la question est d’essayer d’envisager le problème de la légitimité, à savoir envisager le fait qu’on se demande si une œuvre d’art qui n’a pas de signification, qui ne veut rien dire, reste une œuvre d’art. Doit-on, a-t-on le droit et la légitimité de penser qu’une œuvre d’art peut très bien, c’est-à-dire a le droit, la légitimité, de ne rien vouloir dire ?

 

III. Piste de plan

 

Ces deux questions, si on les traite chacune pour soi, peuvent tout à fait être la base de deux parties. Premièrement, on montre que des œuvres d’art ont une signification spécifique, mais que d’autres n’en non pas. Une fois établi que certaines œuvres d’art n’ont pas de signification particulière, avec les difficultés qu’on a associées, montrer qu’elles en ont tout à fait la légitimité.

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